La maison

Plus que centenaire mais sans valeur architecturale particulière, la maison Médard Bourgault possède cependant sa petite histoire patrimoniale. Celle-ci commence en 1920 puis prend tournures et saveurs particulières au fil des quatre décennies suivantes, alors que la maîtrise désormais assumée de son art et une plus grande aisance financière permettent à Médard de rêver sa maison pour lui et les siens.

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Premières constructions

On ne connaît pas l’année exacte de la construction de la maison. Certains suggèrent le milieu du 19e siècle, à l’époque de l’ancêtre Bénoni. Cet homme de caractère fut à la fois, agriculteur, marchand (il aurait possédé une goélette pour le commerce), marguillier (le légendaire familial a retenu une célèbre dispute avec un curé connu pour son arrogance tendance aristocratique et son goût du luxe) et entrepreneur en tout genre. « Bénoni père a été assez porté à établir ses fils. La maison a-t-elle été construite pour Bénoni jr, son fils le plus vieux, ou était-elle déjà là ? » (Alphonse Toussaint, non daté)

On croit savoir que le premier propriétaire connu, Jean Légouï, avait une maison sur le site vers 1780. Un autre texte nous indique que « selon Médard Bourgault, la maison daterait de 1760 »; il attribue son dire à une date inscrite sur une poutre de la partie avant de la maison, découverte lors de la rénovation de la salle d’entrée en 1942 » (André-Médard Bourgault, 1981).

Il semble toutefois qu’aucun document notarié suffisamment clair n’en signale la présence avant 1885.

La maison est donc plus que centenaire, mais n’ayant pas une grande valeur architecturale en soi, la question de son âge reste tout au plus académique. Il s’agit en effet d’une maison campagnarde de bois toute simple, construite en pièce sur pièce  avec un toit en planches verticales. Elle forme un carré de 8,4 m x 10,3 m (27’8” x 34’)). 

Au cours de la décennie 1870, le menuisier Damase Pelletier, alors propriétaire, aurait apporté plusieurs modifications significatives à la maison d’origine, selon Médard Bourgault. Il aurait ainsi rehaussé le solage jusque-là quasi inexistant ; il aurait aussi ajouté des larmiers en coyaux au toit, qui lui donne sa forme galbée typique des maisons du Québec rural et qui ont pour fonction d’éloigner le dégouttement hivernal et les glaçons des murs de la maison. Enfin, il est possible qu’il soit celui qui aurait démoli la grande cheminée qui se trouvait initialement au milieu de la maison.

Le 29 janvier 1920, le jeune Médard Bourgault, 22 ans à peine, surtout marin et un peu menuisier en hiver, achète maison, dépendances et terrain d’Elzéar Toussaint.

En 1923, il épouse sa cousine Marie-Rose Bourgault et, la même année, probablement en prévision d’une famille imminente   il ajoute une grosse lucarne à la façade, transforme le grenier en chambres et modifie la disposition des pièces intérieures du rez-de-chaussée. La table est mise pour la famille, qui commence dès le mois de juin 1924 par la naissance de Jean-Raymond. Au total, quatorze enfants grandiront dans cette maison.

Écrit de Médard Bourgault  août 1924

Ma maison acheté de Elzéar Toussaint le 29 janvier 1920

Intérieur réparé par moi-même 1920

1921 Plafond et boissage, cheminée, réparation du solage

1922 J’ai fait la couverture en bardeau et lambris en bardeau et la mansarde

Ma boutique acheté de mon oncle Alfred, ancienne maison de Fabien Collin et ancienne maison Pier Bar qui était situé dans la cote chez Edouard Bourgault du coté gauche en avant. Rebati par moi-même en 1921

Grange acheté un bout de la vieille grange chez Étienne Leclerc qui avait et bati en 1864 et acheté par moi au prix de 10.00$ et rebati chez moi en 1924

Aout 1924

Transformations

En 1938, il commence à décorer sa maison en fixant aux murs trois murales et une armoire sculptée offerte à sa femme à son retour d’un séjour à l’hôpital.

En 1942 et 1943, avec l’aide de Jean-Raymond, son fils aîné, Médard aménage selon son goût et son imaginaire la salle d’entrée, la belle pièce de la maison pour recevoir les visiteurs de marque. Une douzaine de tableaux sculptés par Médard y racontent l’histoire de ceux que l’on nomme alors les canadiens-français. Deux portes sculptées représentent les saisons et le temps qui passe. Jean-Raymond, de son côté, sculpte les frises au-dessus des portes et les ornements floraux qui séparent les bas-reliefs.

La partie arrière, qui forme aujourd’hui la cuisine, n’est ajoutée qu’en 1944 à la place d’un hangar, démoli pour la cause, qui fut aussi un des premiers ateliers de Médard Bourgault.

Fasciné par les anciennes maisons du Régime français, Médard décide, au milieu des années 50, de recouvrir sa maison de pierres des champs. Entre 1956 et 1958, il va recueillir dans les tas de roches chez ses voisins le matériel requis, qu’il casse et agence « durant ses temps libres ». Il recouvre presque seul sa maison et ajoute au-dessus des portes et des fenêtres des figures et des masques sculptés qu’il enduit de peinture et de sable, une technique de préservation malheureusement pas très efficace mais qui a l’avantage de donner une texture et une apparence calcaire au bois.

À la suite du décès de Médard en 1967, Marie-Rose hérite de la propriété.

Aucune transformation majeure n’est venue modifier l’apparence de la maison depuis 1967, si ce n’est le type de recouvrement du toit et le changement de certaines fenêtres.

Au décès de Marie-Rose en 1978, son fils André-Médard devient propriétaire du domaine.

Il formera une corporation sans but lucratif, appelée Maison-Musée Médard Bourgault, pour appuyer la valorisation du site, et bien que la propriété des lieux soit toujours privée, la maison ouvrira ses portes aux visiteurs estivaux de 1981 à 2000, et à nouveau en 2010 jusqu’à aujourd’hui [1].

En septembre 2017, la municipalité de St-Jean-Port-Joli, à la demande de de la Société québécoise d’ethnologie, reconnaît la valeur ethnologique, culturelle et historique de l’entièreté du domaine en lui attribuant une citation patrimoniale [2].

[1] En 2020, la maison ne fut pas ouverte au public en raison de la pandémie COVID-19.

[2] Pour plus de détails: http://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=211488&type=bien